On le sait, le sport est un bon médicament contre bien des maux. C’est pourquoi une tolérance, voire un encouragement de la pratique, auprès de certaines personnes, a été observé durant la pandémie de Covid-19, alors que l’accueil du public en salle de sport était théoriquement interdit. Qui a pu faire valoir cette autorisation, dans quel cadre et pendant combien de temps ? On fait le point.
Par Léa Borie
Extrait du magazine WOMEN SPORTS N°21 de juillet-août-septembre
Les personnes détenant une prescription médicale APA (activité physique adaptée) – au même titre que les personnes en situation de handicap reconnu par la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées) ont fait l’objet d’une dérogation durant la fermeture des salles de sport, étant considérées comme public prioritaire. Mais comment s’est passée cette autorisation ? Toutes les personnes concernées ont-elles eu à suivre le même processus ?
Une notion récente
La notion de sport sur ordonnance, contrairement à ce qu’on aurait pu croire pendant la Covid-19, ne date pas d’hier. Elle a été promulguée en 2016 par un décret et concerne un type de patients bien identifié. Mais comme tout texte de loi, il prête à interprétation.
C’est la raison pour laquelle, durant les confinements successifs, les organismes de référence (la Haute autorité de santé, l’Institut national de la santé et de la recherche et Santé publique France) ont publié des recommandations ayant vocation à encadrer, à préciser et à rappeler les conditions de dispensation de cette ordonnance si particulière. Et l’ordre des médecins a effectué un rappel pour prévenir les praticiens de ne pas céder à la pression des prescriptions.
Le sport sur ordonnance : quel encadrement ?
Quelles maladies concernées ?
Si l’on en croit les textes, n’ont pu bénéficier de cette ordonnance que les personnes souffrant d’ALD (affection longue durée). La Sécurité sociale a dressé une liste de 30 maladies, recouvrant une importante diversité de pathologies, de la maladie d’Alzheimer à la mucoviscidose, en passant par les cirrhoses, le diabète, la SEP (sclérose en plaques). C’est pourquoi les sports les plus prescrits sont la marche, le vélo, la natation, la gym, et des pratiques sportives qui renforcent l’endurance d’une manière générale.
Une prescription peut courir sur 6 mois à un an. Néanmoins, sur la forme, lors des annonces d’interdiction et de distanciation sociale, « l’Etat n’a pas été très clair au départ, laissant la possibilité à certaines personnes de frapper à la porte de salles de sport avec une prescription médicale », explique Julien Latapie, responsable du centre médical & sportif Ultimate physical à Mérignac (33), axé sur le bien-être et la performance ; lui qui a été contraint de fermer ses portes, au même titre que les salles de fitness classiques.
Pour quel objectif ?
Le présupposé de base est simple : le sport peut, pour bien des affections de longue durée, aider à combattre la maladie. Pour cela, il est essentiel que se mette en place une collaboration entre patients, médecins et pratiquants. Par ailleurs, comme le précise Julien Latapie, « le sport est un des seuls moyens, avec l’alimentation, de booster son système immunitaire ». C’est d’ailleurs dans cette idée que l’OMS a publié une étude sur l’impact de la Covid-19 sur les défenses immunitaires des personnes entraînées sportivement, expliquant que les personnes qui pratiquent régulièrement présentent moins de risques de développer une forme grave de coronavirus.
Pratiquer son sport sur ordonnance de façon encadrée
Amandine* en témoignage a pratiqué en autonomie parce que son ALD le lui permettait. Mais pour que ce dispositif soit efficient, il y a nécessité bien souvent d’apporter une solution adaptée, appuyée d’intervenants formés. En effet, cette prescription demande une attention particulière. D’où un bilan complet de la maladie, afin d’être encadré le mieux possible. Surtout si le médecin a prescrit une APA (activité physique adaptée).
« Une personne souffrant d’une ALD, explique le responsable d’Ultimate physical, c’est avant tout un humain avec son parcours, ses postures. Au-delà de la pathologie, on va chercher à travailler sur le fonctionnement du corps, et l’ALD rentre alors comme un paramètre avec ses conséquences. »
En parlant d’encadrement, ce type de suivi sportif, presque sur mesure, a un coût. Néanmoins, si les patients bénéficient d’une ordonnance, leur pratique n’est pas prise en charge par la sécurité sociale. Seuls certaines options de mutuelles ou assurances le permettent, mais celles-ci tendent à être de plus en plus nombreuses à se mobiliser sur la question, suite à l’épisode de Covid-19.
En mars dernier, on comptait quelques 151 nouvelles labellisations de maisons sport-santé par le ministère des Solidarités et de la Santé et celui des Sports, rejoignant les 138 existantes. C’est ici qu’on oriente les personnes vers une offre sportive adaptée, en s’appuyant d’une liste de professionnels qualifiés, que ce soit des associations, des établissements sportifs, des centres de santé, des hôpitaux, des kinés, des salles de sports privées…
Le témoignage d’une patiente ALD
Suite au confinement et à la sédentarité qui l’a accompagnée, Amandine* souffre depuis des mois de douleurs atroces au pied, couplées à une prise de poids. Son aponévrosite plantaire l’empêche même par moment de poser son pied au sol et nécessite des massages chez le kinésithérapeute. En parallèle, on lui a diagnostiqué une polyglobulie, reconnue en France comme ALD.
On lui a alors permis de se rendre librement à la piscine à partir de mars 2021, alors que celles-ci étaient encore fermées au public : « Je voulais, je devais faire du sport ! Mais j’étais dans l’incapacité de faire du cardio avec mon pied, alors la piscine est devenue incontournable. J’en ai parlé à mon médecin généraliste, et comme mon affection longue durée (ALD) a été reconnue, j’ai pu bénéficier de cette ordonnance. Ce n’est pas le spécialiste qui me suit à l’hôpital qui a pu me la prescrire mais bien mon médecin traitant. Cela m’a permis de me rendre en piscine publique tout ce printemps, une fois par semaine, dans un bassin forcément bien plus vide qu’habituellement : on était à peine une quinzaine sur place ! Et je me suis concoctée ma routine moi-même. »
* Le prénom a été changé