On la connaît bien cette expression, « Respire un bon coup ! ». Surtout avant une compétition ou une rencontre sportive décisive. Ce que l’on connaît moins, c’est la force insoupçonnée de la respiration. On vous embarque à plein poumons… et dans le cerveau !
Par Léa Borie
Extrait du magazine WOMEN SPORTS N°25 juillet-août-septembre 2022
Grands principes pour bien pratiquer la cohérence cardiaque
De Florent Manaudou à Roger Federer en passant par Tiger Wood, nombre de sportifs de haut niveau utilisent la cohérence cardiaque pour préparer leurs compétitions et ainsi optimiser leurs performances. On retrouve d’ailleurs ici, dans la pratique sportive, les premières applications de la cohérence cardiaque. Mais alors comment cela fonctionne ?
On pratique la cohérence cardiaque pour atteindre un état d’équilibre physiologique, physique, mental et émotionnel. Elle requiert un recentrage permis grâce à la respiration. En adoptant un certain rythme physiologique, on va permettre au corps de libérer des hormones type sérotonine, endorphines, mélatonine. D’après les études médicales en neurosciences, on associe systèmes nerveux, cardio-vasculaires, hormonaux et immunitaires.
Les bonnes pratiques
- Adopter une posture confortable
- Se concentrer sur sa respiration
- Respirer sur le principe de base une inspiration de 5 secondes en gonflant le ventre, une expiration de 5 secondes en vidant l’air de son ventre, pendant 5 minutes 3 fois par jour.
Optimiser sa performance sportive
Le décor est posé. Pour aller plus loin, on a étudié l’ouvrage « Cohérence cardiaque et optimisation de la performance », de Claude Cagnon, qu’on a interviewé pour tirer ce phénomène, encore trouble, au clair…
Mettre les mains dans la matrice avec la cohérence cardiaque
« Modifier des paramètres physiologiques et émotionnels », Claude Cagnon
Praticien en cohérence cardiaque auprès des sportifs de haut niveau et agent FFF de joueurs, Claude Cagnon regrette que, bien souvent, dans les clubs, la dimension émotionnelle soit passée sous silence, au profit de l’unique technique ou tactique de jeu. Il considère aussi comme un contresens d’apparenter cette technique à une seule méthode de relaxation.
S’adapter : le sportif ne comprend pas il est remplaçant
« La cohérence cardiaque développe notre capacité d’adaptation et de champ émotionnel ». Claude Cagnon prend l’exemple d’une personne le jour d’un match. Cette dernière pourra être brillante toute la semaine, et échouer le jour de la rencontre car elle devra faire face à des adversaires imprévisibles, un environnement qui n’est pas le sien, soit un contexte hostile. « Il n’aura pas la même clarté mentale en compétition pour être équilibré émotionnellement. La cohérence cardiaque fait alors appel à l’expression de nos mémoires et de nos intuitions pour s’adapter ». Ainsi convient-il de ne pas se laisser gagner par le stress et le déséquilibre émotionnel. D’où l’intérêt de souligner qu’on ne devrait pas dire qu’une personne perd ses moyens mais qu’elle était en incapacité d’exprimer ses moyens. Le spécialiste fait un parallèle avec le travail du chirurgien. En cas d’erreur médicale pendant une opération, « ce n’est pas qu’il n’était pas bon mais qu’il n’a pas pu mobiliser les capacités acquises au cours de ses années d’étude et de pratique ! »
Autre expression contre laquelle se bat le praticien : ‘‘sortir de sa zone de confort’’. « Pour moi, il n’ y a rien de plus dangereux que de demander à un sportif d’en sortir. Ça le placera dans l’action sans se préoccuper de sa récupération. »
Le stress du sportif
« L’équilibre physiologique a des conséquences sur la production de nos hormones. Ainsi, le stress n’est pas une cause mais bien une conséquence. La cohérence cardiaque est un équilibre de nos moyens d’actions et de récupération. C’est lorsqu’il y a déséquilibre entre les deux que naît le stress, ce dernier étant une variable d’adaptation. »
En parlant de stress, Claude Cagnon nous arrête sur celui qui fait grossir, en avançant que 20 à 25 % des sportifs de haut niveau, pratiquant environ du sport 300 jours par an, ont des problématiques de surpoids ou d’indice de masse grasse.
« Ce qui prouve bien que de faire du sport pour maigrir est un contre-sens. On sait aujourd’hui que les personnes qui ont des prédispositions à être stressées seront désavantagées car le stress est la première conséquence du stockage de masse grasse au niveau de la ceinture abdominale. Ainsi, il arrive que ça ne soit pas ce qu’on mange qui prime sur notre poids mais l’état émotionnel dans lequel on est, qui mettra en veille la fonction digestive ».
Une respiration simple ne suffit pas
La cohérence cardiaque se mesure par la variabilité de la fréquence cardiaque ; un moyen d’action sur l’inspiration et de récupération sur l’expiration. Comment ? en mesurant les écarts entre chaque battement cardiaque. Présentée à des sportifs de haut niveau, la méthode est à travailler, d’après Claude Cagnon, à partir d’un logiciel de biofeedback (rétroaction biologique pour apprendre aux sportifs à modifier leur activité physiologique afin d’améliorer santé et performance).
« Cette photo architecturale émotionnelle du sportif lui permet de visualiser sa capacité d’adaptation et de l’évaluer sur 15 jours/un mois. » Et généralement, l’expert estime que les femmes sont plus efficientes dans ce domaine-là. « Elles ont souvent cette capacité à être plus en équilibre, à laisser s’exprimer leur inconscient quand les hommes auront davantage tendance à l’occulter ».
Un travail sur le long terme
Et ne croyez pas qu’en ‘‘quelques séances de respi’’, ce sera réglé pour la vie. « Il s’agit de mécanismes physiologiques, pose Claude Cagnon. On ne peut pas s’affranchir de répéter l’exercice, pour un travail durable de maîtrise de notre expression émotionnelle. La cohérence cardiaque est un cheval de Troie, un moyen de rentrer dans des paramètres physiologiques et émotionnels qui ne sont pas accessibles par la seule volonté ».
Pour aller plus loin autour de la cohérence cardiaque
Cohérence cardiaque et optimisation de la performance : passez du talent au professionnalisme, de Claude Cagnon, 2018