Un trouble du système hormonal, comme c’est le cas avec le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK), a tendance à tout foutre en l’air, à commencer par son hygiène de vie, notamment la régularité sportive. Comment déjouer les déséquilibres pour pratiquer son activité physique malgré tout ? Enquête.
Par Léa Borie, Extrait de Women Sports magazine n°35 janvier-février-mars 2025
Le SOPK (pour Syndrome des ovaires polykystiques) est un trouble hormonal, le plus fréquent chez les femmes en âge de procréer. Il est dû à un dérèglement hormonal d’origine ovarienne et/ou centrale (cerveau). Il entraîne une production excessive d’androgènes, en particulier de testostérone, habituellement produite en petite quantité dans l’organisme féminin. Résultat : des règles irrégulières voire absentes, un risque accru de surpoids, de développer de l’acné, d’avoir plus de pilosité et de souffrir d’alopécie (chute de cheveux). Moins connu que l’endométriose, il touche pourtant 1 femme sur 7 (selon l’INSERM). Il est la première cause d’infertilité, et handicape parfois au quotidien. Si aucun traitement n’existe à ce jour, une fois que le diagnostic a été posé (enfin !), certains facteurs aident à limiter les symptômes, le sport notamment. À condition de le pratiquer à bon escient, au risque d’être contre-productif…
Rencontre avec Péline Abel : « Il faut apprendre à vivre avec le SOPK »
L’histoire de Péline Abel, atteinte de SOPK, devenue coach sportif spécialisée

« J’ai grandi en Turquie, où la prise de la pilule est moins répandue qu’en France ; ce qui explique une moindre errance médicale en matière de SOPK car les jeunes filles se rendent compte plus tôt que leurs cycles sont irréguliers. Ma cousine en souffrait. Moi, je prenais du ventre facilement, j’étais un peu ronde et avec une pilosité plus marquée. À 23 ans, je me décide à aller voir un endocrinologue, suivi d’un gynécologue. Le diagnostic tombe. Je souffre de SOPK. On te dit de manger bien, de faire du sport et on te renvoie dans la nature. Je me suis lancée à corps perdu dans des régimes inefficaces avant de travailler avec une diététicienne, tombant sur un compte Instagram dédié à la diététique SOPK : celui de Ceren Yavuz. Ce suivi m’a grandement aidée. Après avoir suivi des études de sciences politiques, j’ai souhaité me tourner vers le coaching sportif. Or, lorsque je donnais des cours de fitness aux quatre coins de ma ville, à courir partout, je me blessais sans cesse et mon acné était revenue. Comme je faisais beaucoup d’activité physique, j’avais faim tout le temps. Encline aux fringales, j’ai pris du poids ? Avec le stress que tout cela engendrait, mes cycles menstruels sont passés de 32 à 40 jours ! C’est pourquoi j’ai pris le problème à bras le corps en arrêtant les salles de sport à droite à gauche au profit de suivis personnalisés, notamment axés sur les femmes souffrant de SOPK. »
Interview de coach sportif atteinte de SOPK
Détentrice d’un CQP cours collectifs et musculation, puis spécialisée dans le coaching orienté SOPK, Péline Abel nous livre quelques conseils pour une pratique SOPK-friendly.
- WOMEN SPORTS : Quelle pratique est adaptée ou à proscrire lorsqu’on est atteinte de SOPK ?
Péline Abel : Je ne parlerais pas d’un sport en particulier mais d’une pratique adaptée à son niveau. C’est la règle pour viser la régularité. On ne commencera pas direct par des impacts forts et une séance trop difficile. Car rappelons-le : on n’est pas obligé d’être au bord du malaise pour faire une séance efficace… Chez ce public-là, j’ai observé aussi beaucoup d’anxiété ainsi qu’une peur du regard des autres et une mauvaise image de soi, d’où la difficulté d’affronter le jugement à la salle de sport, par crainte de se ridiculiser. Faire du sport à la maison peut être, à certaines périodes, un vrai plus.
- Les personnes atteintes de SOPK ont du mal à être régulières dans leur sport, comment changer ça ?
Je prône une philosophie : le sport pour se sentir bien et non pas pour perdre du poids. Si une femme arrive en se focalisant sur sa perte de poids et que ça ne marche pas, elle se dégoûtera de l’activité physique. Le résultat, ce n’est pas uniquement « perdre du poids, sinon ça ne sert à rien », mais c’est plus général que cela : être moins stressée, dormir mieux, baisser sa résistance à l’insuline, réduire ses fringales, avoir des cycles réguliers, etc. Il faut aussi connaître son quotidien, s’écouter et s’adapter. En cas de déplacement professionnel, d’invités à recevoir, selon les aléas et le niveau de stress qu’ils induisent, on doit adapter sa séance. Selon le moral aussi, certaines séances devront remettre l’esprit en motivation voire en victoire, c’est-à-dire d’éviter l’échec musculaire. On dit qu’on peut augmenter l’intensité de l’exercice physique selon la période du cycle, mais on n’a pas besoin de connaître le cycle de près pour ça. Et puis l’important est de garder toujours le réflexe d’une activité, même réduite si besoin. Le grand défi étant déjà d’aimer le sport !
- Quel est le risque à pratiquer un sport non adapté ?
Les vidéos YouTube acharnées et les HIIT (cours à haute intensité, NDLR), prometteurs de brûler 500 calories, sont en général inadaptés pour tenir sur des mois, surtout si l’on démarre. Le SOPK tourne déjà sur un mécanisme déséquilibré. Si on ajoute du stress à ce corps, il n’en sera que plus déséquilibré, avec donc à la clé le retour de l’acné, une prise de poids et plus de fringales. De plus, si les recherches n’ont pas encore creusé cet aspect, j’ai expérimenté que les personnes souffrant de SOPK sont davantage sujettes aux blessures.
- Le sport peut-il limiter les symptômes du SOPK ?
Prenons appui sur les études durant les parcours PMA (de procréation médicalement assistée, NDLR). Les recherches montrent que la prise de médicaments seule est moins efficace que de coupler médicament + activité physique dans la fertilité, d’autant plus que le combo alimentation + médicament. Les personnes atteintes de ce syndrome peuvent rencontrer davantage de TCA (troubles du comportement alimentaire, NDLR), créant ainsi une coupure entre leur corps et elles-mêmes. Le sport peut leur permettre une reconnexion. Il y a souvent dans les symptômes des douleurs lombaires et une faiblesse abdominale. Le sport viendra donc renforcer l’ensemble.
- Et l’alimentation dans le SOPK, quel rôle joue-t-elle ?
C’est évidemment une clé pour rééquilibrer les hormones. Plus on mange riche en glucides, plus la fringale arrive ! On optera donc davantage pour une alimentation équilibrée et anti-inflammatoire, à faible indice glycémique. Cela permet de rééquilibrer le métabolisme par rapport au sucre notamment.
- Péline, le mot de la fin pour un beau mariage sport/ SOPK ?
Le sport doit être un compagnon de route. Le SOPK, on vivra avec toute sa vie, alors on est obligé d’intégrer le sport au quotidien. Au moindre écart, les symptômes reviendront. C’est un soin de toute la vie, mais ça tombe bien, une vie, on en a qu’une !
Merci à Péline Abel, @pelinecoachsopk sur Instagram.
Un coup de pouce supplémentaire ? Eva Lecoq et SOVA
Pas de remède miracle (ni de traitement à ce jour…). Mais. En complément des mesures hygiéno-diététiques énoncées ci-dessus en matière d’activité physique et d’alimentation, la prise de compléments alimentaires peut contribuer à réguler l’équilibre hormonal. Les soeurs Eva et Solène Lecoq, atteintes de SOPK, ont développé Sova en 2022, la 1ère marque de bien-être dédiée au SOPK. Leur but : développer des compléments sans hormone qui répondent aux besoins des femmes concernées. Leurs produits aident notamment à maintenir l’équilibre glycémique mais surtout, à libérer la parole autour de ce syndrome ! Désormais, la communauté Sova, c’est 100 000 personnes sur les réseaux. Eva a bien voulu nous éclairer sur quelques précieux points.

Un constat, selon Eva Lecoq: des femmes désarmées
• Les effets physiques dus au SOPK finissent par affecter la confiance en soi et rendent la vie de tous les jours plus compliquée.
• Beaucoup de femmes se sentent isolées ou incomprises face à cette condition qui reste encore mal connue. Les incertitudes et la gestion au long cours amènent souvent anxiété et baisse de moral. Elles ont besoin de soutien pour surmonter cette charge mentale.
• De nombreuses femmes se sentent perdues face au manque d’informations claires et de suivi personnalisé. Le milieu médical ne prend pas toujours en compte tous les aspects de leur condition, ce qui les laisse un peu seules face au SOPK.
Reprendre le contrôle
« Un des bénéfices clés, souvent sous-estimé, de l’activité sportive avec le SOPK est la reconnexion à soi, à son corps et le boost de confiance en soi que cela procure », pose Eva Lecoq. « Le fait de relever des défis et de se dépasser est une manière d’améliorer l’estime de soi ». De quoi se sentir plus en contrôle et de trouver un meilleur équilibre mental.