Née à Aurillac le 20 février 1875, Marie Marvingt vécut à Nancy où elle est inhumée. Elle mena une vie d’aventures et d’exploits jusqu’à la fin de ses jours. Elle fut une sportive et aviatrice d’exception et contribua à l’essor de l’aviation sanitaire. Son père l’a incitée à s’essayer à plusieurs activités sportives : cyclisme, escrime, alpinisme, sports d’hiver, natation, boxe, canoë, tir…au point qu’il est difficile d’en donner une liste exhaustive. Elle mourut dans le dénuement le 14 décembre 1963 à l’âge de 88 ans.
Par Djedjiga Kachenoura, présidente de Sport Univers’Elle
Marie et la bicyclette
Nous sommes à l’orée du 20ème siècle, une jeune femme d’une vingtaine d’année souhaite assister à l’une des nombreuses éruptions volcaniques du Vésuve. Ni une ni deux, elle prend alors son vélo pour relier Nancy à Naples malgré la qualité des vélos et des routes ainsi que les contraintes vestimentaires et les mentalités du début du siècle
En 1908, elle est décidé àparticiper au Tour de France et ses 4488 km mais les femmes n’y sontpas acceptées, elle s’élance au départ de chacune des 14 étapes avec un décalage de 10 minutes par rapport au départ masculin. Elle réussit à finir la grande boucle et à figurer parmi les 36 rescapés des 114 partants. Un exploit !
Des décennies plus tard, en 1961, la jeune femme n’est plus aussi jeune mais du haut de ces 86 ans elle n’hésite pas à enfourcher son vélodepuis Nancy pour se rendre à Paris où elle devait effectuer un vol en hélicoptère.
Mais ces quelques lignes du curriculum cycliste de Marie Marvingt ne dévoilent qu’une partie infime de sa vie grandiose et étourdissante Dans le monde de Marie, la Terre semble trop petite pour rassasierses désirs d’aventures.
Marie, la sportive accomplie
Une certitude, Marie semble être douée de toutes les qualités physiques et mentales qui permettent d’exceller en sport : force, endurance, vitesse, souplesse, et adresse auxquelles s’ajoute sa résilience. Ce qui la rend exceptionnelle est sa capacité à avoir valorisé ce bagage inné pour repousser les limites de son temps et explorer la terre, le ciel et changer le monde.
Marie ne s’est donc pas limitée au vélo, elle obtient son permis de conduire dès 1899, ensuite son brevet de pilote de ballon libre en 1901. En 1906, elle effectue la traversée de Paris à la nage, un parcours de quelques 12 km, et bat la détentrice du record. En 1908 et pendant deux ans, elle domine les sports d’hiver (ski, patinage et bobsleigh). Ces mêmes années, elle se distingue parmi les meilleures alpinistes mondiales et atteint plusieurs sommets des Alpes. En 1910, elle est sacrée médaillée d’or par l’Académie des Sports, pour tous les sports.
Insolite Marie
Parmi d’autres activités, parfois insolites et plus discutables de nos jours, telles que la chasse du phoque en Arctique ou de la panthère en Afrique, Marie a plongé au large de Tripoli pour cueillir de l’éponge. Enfin, elle a inventé le ski sur sable sur les pentes des dunes marocaines.
Marie et les airs
Après avoir touché à tout sur terre, Marie voit plus haut et devient alors l’une des pionnières, femmes et hommes confondus, de l’aéronautique : Elle effectue en 1909 son premier vol seule à bord d’un ballon pour un trajet de Nancy à Karlsruhe (Allemagne). Un mois plus tard à peine, elle achève une traversée périlleuse de la mer du Nord à bord de son ballon l’Etoile Filante de Nancy à Southwol (Angleterre), contre les vents dominants. En 1910 et après des cours de pilotage à Mourmelon, elle devient la troisième femme au monde à obtenir son brevet de pilote d’avion. Mais l’aventure ne s’arrête pas là, Marie enchaîne alors des milliers de kilomètres et des centaines d’heures de vol. Pendant la première guerre mondiale, Marie est tour à tour poilu (e) dans les tranchées, elle participe à des bombardements et est aussi aide-soignante.
Pendant les décennies suivantes, Marie enchaîne les aventures et surtout des conférences à travers le monde principalement autour de la promotion de l’aviation sanitaire : adapter l’aviation pour déplacer les blessés vers les soignants ou les soignants vers les blessés.
Vers la fin de sa vie, Marie obtient son brevet de pilote d’hélicoptère, elle cumule ainsi les brevets de ballon, d’aéroplane, d’hydravion et d’hélicoptère.
Dans la presse, « de l’énergie pour vos enfants »
De l’année 1905, date à laquelle on recense les premiers articles consacrés à ses exploits d’alpiniste, jusque dans les années 1930, Marie a été racontée une centaine de fois avec éloge par la presse française et surtout étrangère. C’est ainsi qu’elle fut nommée « La fiancée du danger », du fait notamment de sa périlleuse traversée de la mer du Nord ou encore de l’avalanche de pierres qui a failli lui coûter la vie dans les Alpes ou encore le crash de son avion.
Mais au fond, quelle était la ferveur qui animait cette femme ?
La citation d’une de ses principales biographes décrit très bien le personnage, Rosalie Maggio à propos de Marie : « Elle n’a jamais eu de limites. Elle a ouvert le ciel et le sport aux femmes. On en bénéficie toutes aujourd’hui. Mais c’était de manière inconsciente et involontaire. Elle ne le faisait pas spécialement pour les femmes, mais parce qu’elle le voulait. C’était peut-être la manière la plus intelligente de faire avancer les choses ».
Marie avait pour devises « Savoir vouloir c’est pouvoir » ou encore « Je décide de faire mieux encore et toujours », des citations qu’elle s’est appliquée toute sa vie. Elle est décédée six ans avant de voir le premier Homme fouler la Lune, l’un de ses ultimes rêves. Si elle était encore en vie, elle aurait tout fait pour aller dans l’espace. Certains biographes disent même qu’elle se serait inscrite à un programme de voyage sur la Lune.