La Coupe du monde féminine de rugby aura lieu du 9 au 26 août 2017 en Irlande. Le XV de France féminin, qui avait terminé troisième du Mondial 2014 organisé en France, peut créer l’exploit. Nous avons rencontré Safi N’Diaye pour évoquer cette échéance, mais aussi pour en savoir plus sur la réalité du rugby au féminin en France.
Propos recueillis par David Tomaszek
Safi, faisons tout d’abord plus ample connaissance avec vous. Vous êtes l’une des cadres du XV de France féminin. Quel est votre parcours sportif ?
Issue d’une famille très sportive, j’ai débuté le rugby dès l’âge de 12 ans dans ma ville de Castres, après m’être d’abord essayée au basket. J’ai vite compris que mon gabarit (ndlr : 1,83 m) était très adapté au rugby. J’ai tout connu avec Castres depuis les équipes de jeunes jusqu’à l’équipe première avec laquelle j’ai remporté deux titres dans deux championnats différents (Fédérale 2 et Fédérale 3). Puis, en 2011, j’ai rejoint Montpellier qui évolue dans le Top 8, l’élite du rugby féminin. J’ai connu 4 titres et 6 finales en 6 saisons. Avec l’équipe de France, j’ai connu des moments fantastiques. Le point d’orgue étant cette saison 2014 au cours de laquelle nous avons réalisé le Grand Chelem dans le Tournoi des Six nations et atteint la troisième place dans la Coupe du monde organisée en France.
Quel est votre parcours « dans le civil », hors du rugby ?
Je suis éducatrice. Je travaille auprès de jeunes en difficultés, placés en foyer ou en famille d’accueil, que j’accompagne dans le cadre de projets individuels. J’ai toujours eu la volonté de travailler dans le domaine de l’aide à la personne. J’adore mon travail.
Travaillez-vous à temps plein ou à temps partiel, comme le font notamment les footballeuses semi-professionnelles ?
Je travaille à temps plein ! Le rugby à XV est pour l’instant totalement amateur en France. Seules les joueuses de l’équipe de France de rugby à VII ont des contrats fédéraux et donc un statut que l’on peut qualifier de professionnel. D’ailleurs, le fait que ces joueuses, qui ont disputé l’an dernier les JO à Rio, nous rejoignent pour la Coupe du monde est un avantage. Car nos principales adversaires (Angleterre, Nouvelle-Zélande, Canada, Irlande…) sont toutes professionnelles ! J’ai la chance d’avoir un patron sympa, qui aime le rugby. Il aménage mon temps de travail autant qu’il le peut. Il ne me donne jamais de permanence le week-end, car il sait que j’ai des matches à jouer. Pour les stages avec l’équipe de France, il bénéficie d’une petite aide de la région qui permet de financer mon absence. Mais hormis ces menus aménagements, je travaille bel et bien à temps plein, comme tout le monde !
Le rugby ne vous rapporte pas d’argent ?
Notre salaire, c’est de gagner des titres ! Nous sommes défrayées, mais le rugby ne nous rapporte pas d’argent. C’est sans doute pour cela que notre sport reste très populaire et que l’équipe de France jouit d’une belle cote de sympathie depuis 2014. Nous sommes des filles « normales » ! Dans le groupe de l’équipe de France il y a une maman, une comptable, une caissière… On adore ce qu’on fait et il y a une super ambiance dans le groupe. Le paradoxe, c’est qu’on aspire à devenir professionnelles. Ce serait l’évolution logique. Mais en même temps, on ne veut pas perdre cette pureté.
Vous dites qu’il n’y a qu’une maman en équipe de France. Difficile de concilier ce sport avec une vie de famille ?
Oui. Le rugby est un sport exigeant sur le plan physique. Reprendre après un an d’arrêt est extrêmement difficile. La plupart des filles attendent la fin de leur carrière pour avoir un enfant. Et puis s’il n’y avait que le sport et la maternité à gérer… mais il faut en plus assumer un travail !
Plongeons-nous dans cette Coupe du monde qui approche. Quelles sont les chances du XV de France ?
En 2014, nous avons terminé sur une troisième place assez frustrante en perdant contre des Canadiennes qui étaient largement à notre portée. Cette année nous pouvons envisager d’aller plus haut ! Notre poule est très relevée avec l’Irlande qui évoluera à domicile, le Japon et l’Australie. Il n’y aura aucun match facile, pas de round d’observation. Mais si nous sortons de cette poule, tous les espoirs sont permis !
Dernière question, vous connaissez personnellement Laura Flessel avec qui vous partager notamment le rôle d’ambassadrice BMW. On imagine que vous vous réjouissez de la voir ministre des Sports ?
Je suis vraiment ravie. Je la connais bien et je pense que ce sera une excellente ministre. C’est une femme, c’était une très grande sportive et elle a du caractère. Dans la perspective des JO 2024, je pense que c’était vraiment le meilleur choix possible !
SAFI N’DIAYE, en bref
Née le 16 juin 1988 (29 ans) Formée à Castres où elle a débuté dès l’âge de 12 ans
Recrutée par Montpellier en 2011 : bilan 6 nales et 4 titres du Top 8 en 6 saisons
En équipe de France depuis 2012 A participé au Grand Chelem des Bleues dans le Tournoi des Six nations féminin en 2014