Venue des États-Unis, la pratique audacieuse de la slackline, entre funambulisme et trampoline, émerge en France. Technique voyage-friendly, elle permet de découvrir des paysages époustouflants ! Et justement, pour admirer les plus belles vues, on va où ? Nous avons posé la question à deux spécialistes, Coralie Girault et son compagnon, Nicolas Margaron. Interview croisée.
PAR LÉA BORIE
Extrait du magazine WOMEN SPORTS N°8 d’avril-mai-juin 2018.
PETIT POINT SUR LA PRATIQUE DE LA SLACKLINE
La slackline (comprenez « ligne lâche » en français) consiste à tendre une ligne entre deux extrémités, deux mâts, deux arbres… Elle se divise en plusieurs variantes :
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la jumpline (ou trickline) : des figures aériennes sur une ligne tendue de 25 à 30 m, proche du trampoline et de la poutre en gymnastique,
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la longline : longue distance, plus de 150 m,
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la blindline : les yeux bandés,
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la highline : suspension en hauteur, généralement entre deux falaises, avec harnais de sécurité. Elle se pratique majoritairement en outdoor et l’objectif recherché est de ressentir des sensations fortes et un goût de liberté
DEUX PASSIONNÉS DE SLACKLINE POUR NOUS RÉPONDRE :
- Coralie Girault championne de France et vice-championne du monde de slackline spécialisée dans la jumpline
- Nicolas Margaron athlète spécialisé dans la longline et highline
Boute-en-train d’1m60, Coralie, cette ancienne gymnaste d’à peine 30 ans, s’est lancée sur le fil en 2014 avec la jump. Elle pratique aussi la longline. C’est elle qui est à l’origine du Championnat français de trickline 2016-2017.
Son compagnon, Nicolas Margaron, est adepte de grands projets pour découvrir les beaux paysages. Tous deux ont soif de participer aux grands événements de ce sport, où qu’ils aient lieu dans le monde. Un jeune couple passionné de la discipline qui nous fait découvrir le monde à travers des expériences sportives à couper le souffle.
• Votre expérience de slackline la plus époustouflante ?
Coralie : On a tous les deux adoré la Réunion, une excursion d’un mois en mars 2017. On y allait au départ pour présenter le festival de sports extrêmes de la Réunion ; on y a d’ailleurs gagné le prix de la meilleure performance sportive en vidéo ; et on a réalisé à quel point c’était une île incroyable pour pratiquer. Nos trois spots favoris ? Le Cap méchant, un cratère de roche volcanique en bord de mer, avec des vagues qui nous passent dessus, le lever de soleil au Maïdo avec une super vue sur les montagnes au réveil après une installation nocturne, et la Cascade de Langevin, une eau extrêmement froide jaillissant de la paroi rocheuse !
• Votre meilleur souvenir en Europe Coralie ?
Aveiro au Portugal, à l’occasion d’un festival de sport féminin. J’ai pu slacker entre deux pirogues, en traversant un canal à la manière d’un petit Venise. Là-bas, j’ai aussi survolé un bain de sel et de boue, un beau défi, au risque de tomber dedans…
• Et vous Nicolas ?
Au Portugal aussi, à Cabo da Roca, pointe la plus à l’Est de l’Europe. C’est là qu’on a élu domicile pour 2 semaines en 2014 pour slacker au-dessus de l’océan jusqu’au phare, avec une spaceline (sorte de toile d’araignée avec trois slackes qui se rejoignent).
Et puis il y a aussi l’Europe de l’Est, avec un grand trip commencé en République tchèque sur fond de festival de musique, suivi d’un festival à Lublin en Pologne, puis en Autriche.
Et coté urbain ?
Coralie : La Zot Day à Bruxelles, où je vais tous les ans. On slacke entre deux bâtiments imposants avec une vue imprenable sur la ville belge, un point de vue précieux qu’on n’aurait à aucun autre endroit !
• À propos, quels sont les festivals que vous préférez ?
Coralie : La Coupe Icare, à Saint-Hilaire du Touvet, au-dessus de Grenoble. C’est le plus gros festival de parapente, vol libre, delta plane… Et moi, je fais une démo avant leur décollage. J’avais aussi participé à un festival à Abu-Dhabi avec animations autour de sports peu connus comme la trickline, sur une étendue d’1 km. Sans doute un pays que je n’aurais jamais découvert sans ma pratique ! Dans la même idée, j’ai aussi adoré la World Cup à Munich, festival de trickline en pleine place centrale. C’est marrant de l’intégrer dans la ville car on a plus tendance à nous voir dans les parcs. Les gens en entendent plus parler, ça démocratise la pratique ! Et ça peut même susciter des envies…
• Et si on vous dit « slacker à deux pas de chez vous » ?
Nicolas : Pour moi, en France, on a la plus grosse diversité de spots qui existent, notamment les lignes alpines comme à Chamonix, entre alpinisme et slackline, idem pour la waterline. On est envié pour ça, ça explique d’ailleurs le nombre important d’étrangers qui viennent pratiquer chez nous. C’est aussi là où on a battu beaucoup de records de longline, avec Natan Paulin et Théo Sanson. En particulier en région Rhône-Alpes, où l’on vit. C’est à Toussieux dans les Dombes, au milieu des champs de blé, de maïs et de colza, sur les terres d’exploitants agricoles, qu’ils ont parcouru 614 mètres. Et ensuite, on a mis un coup de pied dans la fourmilière dans le Sud de la France en lançant le 1 000 m de ligne avec eux.
• Et maintenant, vous aimeriez voir quoi ?
Coralie : L’Autriche, car le pays a beaucoup de forêts et de montagnes, et on a vu encore peu de projets de slackline se monter vrai, mais qui a la chance d’être très vallonnée.
Nicolas : Tenter le Nord, pour aller slacker entre deux glaciers.
• Qu’est-ce que ça vous apporte ?
Nicolas : Souvent, on part sur un spot ou un festival avec une idée en tête, et on se laisse surprendre par des lignes encore plus surprenantes une fois sur place !
Coralie : On cherche vraiment l’originalité avec des paysages différents, des endroits un peu perdus, ça fait partie intégrante du sport pour nous ! Le plus intéressant, c’est de monter des lignes jamais réalisées auparavant ! Cet été, je pars un mois et demi en Europe, et c’est la pose de slacklines qui va me guider dans mon trip. Au final, notre pratique est un vrai guide de voyage. Notre plus gros défi après ça est de trouver où accrocher nos lignes en dégradant un minimum l’environnement. Donc, on évite de poser des spits comme en escalade.
• Le mot de la fin ?
Coralie : Pour les débutants, je conseille d’aller sur la plage. C’est un lieu rassurant et pratique pour apprendre, car on peut tomber sans se blesser. Pour fixer ses deux points d’attache, on peut les enterrer à 1 mètre de profondeur dans le sable.
Nicolas : La discipline veut qu’on soit accrochés en longline. Ça s’apparente certes au funambulisme mais pas avec les mêmes règles. Ici, on est quand-même en sécurité. Ça n’empêche pas les palpitations !